Juger Robespierre, l’interminable procès


Le tribunal de l’Histoire a toujours du mal avec le cas Robespierre. Peut-on acquitter la terreur ? Peut-on ignorer les qualités d’un chef d’Etat dont le pays est assiégé par l’Europe entière ? Une table ronde animée par Olivier Coquard tentera de répondre à la question le vendredi 16 février à 17h. Venez nombreux !



La figure de Robespierre incarne deux visages de la Révolution ; cette dualité est née sans doute dès 1791, quand il s’est imposé comme l’un des plus remarquables dirigeants du mouvement révolutionnaire. Premier visage : celui du tyran sanguinaire ou, pour reprendre un titre cher à Historia, du « psychopathe légaliste ». Il est l’incarnation de la Terreur, des massacres en Vendée, de la chasse aux prêtres réfractaires, il est l’homme qui a placé la surveillance et la répression aveugle au cœur de son pouvoir, le maître du terrible Comité de Salut Public. Il est celui qui incarne, en somme le « dérapage » de la Révolution qui a, à cause de lui ou au moins par lui, abandonné les Droits de l’Homme pour embrasser la tyrannie la plus sanguinaire. Ce Robespierre-là est, depuis son apparition dans les journaux de la contre-révolution, le plus souvent représenté, à la fois par les opposants à la Révolution et par les historiens démocrates et libéraux qui se sont succédés depuis Jules Michelet au XIXe siècle jusqu’à François Furet ou Patrice Gueniffey aujourd’hui. Cette image du Robespierre monstrueux domine dans une large partie de l’opinion publique.
Pourtant, un second visage résiste voire, aujourd’hui, progresse : Robespierre a imposé le suffrage « universel », il a défendu les droits des pauvres, il a promu l’éducation gratuite, obligatoire pour tous ; il a fait voter la première abolition de l’esclavage ; il a contribué à réfléchir aux droits des travailleurs et surtout, avec l’aide du « Grand Comité » de Salut Public, il a sauvé la France des envahisseurs et de la guerre civile. Ce second visage a longtemps été défendu par la gauche radicale, celle de Louis Blanc ou de Louise Michel ; les communes de la « Banlieue Rouge », sous la IIIe République, ont tenu à lui dédier des rues ou des places… Chez les historiens, les « Robespierristes » se recrutaient d’abord chez les militants de gauche, d’Albert Mathiez à Albert Soboul.
Comment, aujourd’hui, trancher dans ce débat ? Probablement en montrant comment ce débat lui-même est, en fait, un « objet historique », un objet d’étude ; et en replaçant l’étude de Robespierre dans une interrogation historique : en quoi est-il révélateur ou exceptionnel dans son époque ? Dans quelle mesure en est-il le jouet ou l’acteur ? Sans doute le regard croisé d’historiens aussi différents qu’Alice JourdanEmmanuel de WaresquielAlberto Toscano et Hervé Leuwers permettra-t-il de comprendre mieux pourquoi le procès de Robespierre existe et pourquoi ce procès, somme toute, ne peut pas finir.
Table ronde à l'auditorium du Palais des Congrès de Strasbourg le vendredi 16 février à 17h dans le cadre du Festival Historia (16-18 février 2018).